PATRICE Chaque poids est divisé en deux éléments. Il y a trois poids de 4 livres 13 onces plus un poids d’une livre. Une fois l’assemblage terminé, on aura deux poids légers (d’environ 4 livres 13 onces chaque) et un poids lourd (d’environ 5 livres 13 onces). Tout se tient, mathématiquement. Il faut accrocher le poids lourd à la chaîne de droite quand on regarde l’horloge de face, et accrocher les poids légers aux deux autres chaînes. Le poids de gauche commande le mécanisme du carillon. Quand je l’accroche à la chaîne, la mélodie des carillons de Westminster résonne partout dans le salon. J’ai peur de réveiller les enfants. Ou pire, Leur donner la chienne avec un vieil objet, jusqu’à maintenant muet, qui se tient discrètement dans le coin du salon depuis une semaine. Le chêne massif se marie bien aux planchers de pin et aux murs de la même essence. Je lis dans le manuel que l’horloge m’offrira - nous offrira - de nombreuses années de loyaux services. Là, elle aura pas le choix de prendre vie. Les deux pièces de laiton, le cadran et le disque indiquent l’heure et les phases de la lune. Est-ce que c’est joli ou étrange? Ou cruellement romantique. Y a aussi un paysage campagnard et un bateau à voile en haute mer. Qui touche - j’l’avoue - des cordes sensibles en moi. Je sais pas si je l’ai dit, mais mon horloge grand-père appartenait à… mon grand-père. Mes souvenirs de lui s’incarnent dans « ce meuble magnifique qui témoigne des caractéristiques de fierté et d’intégrité associées aux réalisations de Ridgeway Clocks. » Quand on a installé les meubles, pendant le déménagement, je racontais aux enfants que les objets qui prennent vie dans La Belle et la bête feraient la même chose dans notre nouvelle vieille maison de campagne. J’espère qu’ils ont oublié parce que l’horloge pourrait leur donner la chienne pour vrai. Tout le trouble que je me suis donné pour un objet qui donne l’heure et joue de temps en temps l’extrait d’une symphonie de Haendel. Pour un gars qui a pas eu de montre depuis sa première communion, c’est un peu stretché. Une montre de Tintin offerte de façon cérémoniale, par mon grand-père, qui a tout fait pour que mon entrée dans la foi se fasse à la basilique-cathédrale Notre-Dame d’Ottawa, en face du Musée des beaux-arts. La dernière fois que j’ai mis les pieds dans la cathédrale, c’était à ses funérailles. Une montre de Tintin, une horloge grand-père. Le poids central commande le mouvement de l’horloge. Quand j’ai déposé l’horloge dans le coin du salon, le cadran indiquait 22h47. Cette fois-ci, j’ai réussi à pas marquer le plancher. Le pin, ça se scratch facilement : surtout quand tu déplaces toute tout seul. Là, j’attends patiemment que le four indique 22h47 pour activer le mécanisme de l’horloge. 22h46. J’ai 59 secondes pour pas manquer mon cue.