L’économie sociale en Outaouais et dans les Laurentides, une force de développement territorial.

Dans cet épisode, Yvon Leclerc qui compte parmi les instigateurs du projet, nous présente les Ateliers du ruisseau, une coopérative offrant un espace de vie et d’ateliers de création pour les artistes en Outaouais. 

What is L’économie sociale en Outaouais et dans les Laurentides, une force de développement territorial.?

Cette série de baladodiffusion s’intéresse à des entreprises d’économie sociale de l’Outaouais et les Laurentides. L’objectif est de donner la parole à ces organisations afin de nous permettre de découvrir leurs activités, leur réalité et les enjeux auxquelles elles font face. Dans le cadre de la série, vous aurez la chance d'entendre le récit de huit entreprises d'économie sociale en plus de celui de la Coopérative de développement régional Outaouais-Laurentides et de la ville de Gatineau.

00:00:07
Cette série de baladodiffusions s'intéresse à des entreprises d'économie sociale de l'Outaouais et des Laurentides.

00:00:14
L'objectif est de donner la parole à ces organisations afin de nous permettre de découvrir leurs activités, leur réalité et les enjeux auxquels elles font face.

00:00:23
Cette série s'insère dans le cadre d'un projet de recherche mené par Julie Bérubé et ses collègues, Marie-Laure Diot, Guy Chiasson et Thomas Colombat de l'Université du Québec en Outaouais, ainsi que Patrick Pilote et Andy Eisen du CEGEP de l'Outaouais.

00:00:37
Ce projet découle d'un partenariat avec la coopérative de développement régional Outaouais-Laurentide.

00:00:49
Julie: Bonjour.

00:00:49
Julie: Donc aujourd'hui, j'ai le plaisir de m'entretenir avec Yvon Leclerc des Ateliers du Ruisseau.

00:00:54
Julie: Bonjour Yvon.

00:00:56
Yvon: Bonjour.

00:00:57
Julie: Merci beaucoup de nous rencontrer aujourd'hui.

00:00:59
Julie: Est-ce que vous pouvez commencer en vous présentant un tout petit peu votre parcours et ce qui vous a amené aux Ateliers du Ruisseau?

00:01:05
Yvon: Oui.

00:01:07
Yvon: Au départ, j'ai fait un bac en histoire, ensuite le MBA, ce qui m'a amené beaucoup à m'intéresser au développement économique.

00:01:18
Yvon: Par la suite, j'ai fait une carrière plutôt politique avec le gouvernement de M.

00:01:26
Lévesque et le docteur Lorrain.

00:01:29
Yvon: Et puis, à ma retraite, je suis retourné aux études et j'ai fait un doctorat en études urbaines avec comme thème, justement, le lien entre l'entrepreneuriat et le développement urbain.

00:01:49
Yvon: Mon étude de cas, c'était la revitalisation du quartier Saint-Roch à Québec.

00:01:56
Yvon: Maxime Pedneau-Jobin et Stéphane Psenac, qui étaient présidents de la commission des arts à l'époque, avaient eu vent de cette recherche et m'ont invité à travailler avec eux…

00:02:11
Yvon: …même à mettre sur pied le parti Action Gatineau, j'ai été un des premiers signataires, et surtout pour le programme avec la dimension culture et le lien entre culture et le développement urbain.

00:02:29
Yvon: Ça m'a amené à comprendre qu'il y avait une grande lacune à Gatineau pour la disponibilité des ateliers d'artistes.

00:02:41
Yvon: C'est comme ça que je suis arrivé, de fil en aiguille, à m'intéresser à cette question-là.

00:02:49
Julie: Le moins qu'on puisse dire, c'est que vous avez une feuille de route intéressante.

00:02:53
Julie: Est-ce que vous pouvez nous parler un peu maintenant des Ateliers du Ruisseau?

00:02:55
Julie: C'est quoi les Ateliers du Ruisseau, puis comment ça a été mis en place?

00:03:00
Yvon: Les Ateliers du Ruisseau, c'est un projet d'un centre multifonctionnel en arts visuels, métiers d'art et arts numériques.

00:03:11
Yvon: C'est un projet qui répond à un besoin.

00:03:15
Yvon: Le besoin avait été nettement identifié par les artistes…

00:03:21
Yvon: …et par une étude que la ville m'avait demandé de réaliser sur la présence des ateliers d'artistes sur le territoire de la ville de Gatineau.

00:03:32
Yvon: Alors cette étude je l'avais déposée au conseil municipal et puis tous les conseillers sont intervenus pour dire, pour appuyer le besoin parce qu'ils ont compris qu'il y avait un besoin.

00:03:45
Yvon: Alors ça a été plus facile par la suite d'arriver avec un projet qui comble ce besoin.

00:03:53
Yvon: Et les Ateliers du Ruisseau, c'est un projet, c'est une coopérative, coopérative de solidarité.

00:04:03
Yvon: Et ça, j'insiste pour dire que c'est un projet qui émane des artistes eux-mêmes.

00:04:11
Yvon: Moi, j'ai été là comme un faire-valoir, comme...

00:04:17
Yvon: Quelqu'un qui avait l'expérience du niveau politique, de l'administration, des rouages.

00:04:26
Yvon: J'ai été là pour le mettre en place, mais ce sont les artistes qui composent le conseil d'administration, un peu comme Méduse à Québec, sur la côte d'Abraham, qui est composé uniquement d'artistes et qui fonctionne très bien.

00:04:45
Julie: Et pouvez-vous nous parler des différentes étapes qui ont amené la création des Ateliers du Rousseau et où on en est rendu aujourd'hui dans ce projet-là?

00:04:53
Yvon: Oui, la première étape, c'était de constituer la coopérative, de la faire entériner vraiment par les artistes en Assemblée Générale. Donc, les artistes sont vraiment à l'origine de ce projet.

00:05:12
Yvon: Et puis, par la suite, on a travaillé pendant un bon deux ans sur le concept lui-même.

00:05:20
Yvon: Qu'est-ce que ce serait et comment bien répondre aux besoins des artistes.

00:05:27
Yvon: Besoins des artistes, mais très rapidement, on s'est rendu compte que la ville pouvait aussi avoir intérêt à mettre sur pied un projet comme celui-là parce que la vérificatrice générale avait semoncé la ville sur la collection permanente qui était entreposée dans de mauvaises conditions.

00:05:49
Yvon: Alors, je me souviens que quand j'avais parlé de ça au maire, il avait dit « Wow, c'est ça qu'il nous faut, il faut la collection permanente et la Galerie Montcalm », qui est dans l'hôtel de ville.

00:06:04
Yvon: Mais quand tu vas à l'hôtel de ville, tu vas pour des besoins liés à la fonction municipale, tu ne vas pas nécessairement à une galerie d'art.

00:06:13
Yvon: Alors, la Ville a vu une opportunité aussi de transférer la collection permanente et la Galerie Montcalm dans un lieu où il y aurait une fréquentation, un achalandage d'amateurs d'art et d'artistes.

00:06:34
Yvon: Donc ce serait beaucoup plus approprié de transférer ces deux institutions.

00:06:39
Yvon: Alors ça, ça a été une des étapes importantes et qui a conduit aussi, par la suite, la Ville à accepter le concept qu'on avait développé.

00:06:53
Yvon: Donc trois étages d'ateliers, et les deux étages du bas qui sont au niveau de la rue pour la galerie Montcalm, la collection permanente et d'autres fonctions.

00:07:08
Yvon: On est en train de compléter cette partie du projet pour peut-être de la vente, peut-être aussi des lieux d'accueil.

00:07:22
Yvon: On est toujours sur ce point-là.

00:07:24
Julie: Puis est-ce que les ateliers sont accessibles en ce moment pour les artistes?

00:07:29
Yvon: Bien, on a...

00:07:31
Yvon: Non.

00:07:32
Yvon: La réponse est non.

00:07:34
Yvon: Mais la pression venant des artistes a été telle qu'on a mis en place des ateliers temporaires.

00:07:43
Yvon: Alors, on s'est mis à la recherche de lieux dans le centre-ville qui pourraient accueillir des ateliers.

00:07:53
Yvon: On en a trouvé un, c'est le 135 rue Eddy et on a installé là 6, 7… 9 ateliers en deux étapes qui logent au total je pense c'est 12, 13 artistes.

00:08:12
Yvon: Certains ateliers sont partagés…

00:08:15
Yvon: …et on a une liste d'attente, mais on n'a pas attendu, ce sont les artistes eux-mêmes qui nous ont pressés de...

00:08:25
Yvon: …d'ouvrir des ateliers temporaires parce qu'il y avait ce besoin et il n'était pas comblé.

00:08:30
Yvon: Et puis, bon, vous parlez d'étapes, mais l'étape du financement est extrêmement importante et c'est un gros projet.

00:08:44
Yvon: C'est comparable à la Maison de la culture, par exemple.

00:08:47
Yvon: C'est un gros projet.

00:09:02
Julie: Vous parlez de financement, comment le projet est-il financé?

00:09:08
Yvon: On a d'abord une bonne nouvelle parce qu'en juillet dernier, il y a deux mois, la Ville acceptait un financement de l'ordre de 21,5 millions au projet.

00:09:28
Yvon: Nous sommes en démarche avec le ministère de la Culture, qui est le deuxième appui financier à aller chercher.

00:09:37
Yvon: Et puis, ça se présente bien, en étant pour parler avec le ministre Lacombe et la députée de Hull aussi, Suzanne Tremblay, qui insiste beaucoup pour la réalisation de ce projet.

00:09:54
Yvon: Alors, on est en pourparler, et puis la troisième étape, ce sera le gouvernement fédéral, mais dans une moindre mesure.

00:10:04
Yvon: Puis, évidemment, au total, la structure financière, c'est 78% de non remboursable, donc des subventions, et 22% qui est hypothèque, financement d'institutions comme le Fonds de solidarité, c'est du capital patient.

00:10:24
Julie: Puis, outre les appuis financiers, avez-vous reçu d'autres types d'appui ou d'aide pour pouvoir créer les ateliers du ruisseau?

00:10:34
Yvon: Desjardins, d'abord.

00:10:35
Yvon: Desjardins suit de très près l'évolution du projet.

00:10:40
Yvon: Nous sommes en discussion avec eux aussi pour le Fonds Grand Mouvement.

00:10:46
Yvon: Donc, oui.

00:10:48
Yvon: Pour l'instant, on sait que le financement privé, lorsque nous avons l'accord de 78% du financement non remboursable, le financement privé, c'est pas un gros problème, il court après nous.

00:11:08
Yvon: Ils veulent placer des fonds de façon sécuritaire.

00:11:12
Yvon: Alors, comme c'est une coopérative. La gestion jusqu'à présent, en tout cas, ça se déroule très bien.

00:11:22
Yvon: C'est sérieux.

00:11:24
Yvon: On nous le dit à la Ville.

00:11:27
Yvon: Je pense qu'on essaie de travailler de façon rigoureuse.

00:11:32
Yvon: Alors, ça ne devrait pas poser de problème pour la suite.

00:11:36
Julie: Parfait.

00:11:38
Julie: Puis, est-ce que vous avez d'autres collaborations ou relations avec d'autres entreprises d'économie sociale dans la région?

00:11:46
Yvon: Oui, bien d'abord nous avons un accompagnement depuis le tout début, même depuis la gestation du projet a été fait avec la coopérative de développement régional Outaouais Laurentides et en particulier Patrick Duguay qui est un vieux complice…

00:12:09
Yvon: …mais aussi avec des associations, des associations d'artistes, autant dans le Pontiac, dans les collines de l'Outaouais, dans Papineau, on a de bonnes relations, de collaborations avec eux.

00:12:30
Yvon: Et puis aussi avec ce qu'on appelle maintenant l'ÉDAC, c'est-à-dire l'École des Arts et des Cultures, qui était l'ÉMI auparavant, le cégep aussi.

00:12:44
Yvon: Et puis, les deux centres d'artistes, que sont Diamond et Axinio VII, à La Filature. Au fond, on essaie d'être ouvert et d'avancer en cordée, comme diraient les alpinistes, avancer ensemble, à la fois pour que ça n'empiète pas dans leur champ de compétences, et aussi combler des lacunes actuelles.

00:13:14
Yvon: Par exemple, on sait qu'à l'ÉDAC, il n'y a pas beaucoup d'inscriptions en arts visuels, c'est plus en muséologie, mais on pense que, et ça, la direction de l'ÉDAC le sait très bien, on pense qu'avec un projet comme celui-là, ça va sensiblement augmenter les inscriptions en arts visuels, autant au cégep, d'ailleurs, que à l'université.

00:13:44
Yvon: Alors, c'est un projet qui a beaucoup de ramifications et beaucoup de liens communautaires.

00:13:54
Yvon: Ça a un impact qui est assez diffus parce que ce n'est pas aussi comptabilisable que d'autres types d'entreprises, mais c'est là quand même.

00:14:10
Yvon: C'est Einstein qui disait « Ce qui compte ne peut pas toujours être compté et ce qui peut être compté ne compte pas forcément. »

00:14:22
Yvon: Et ici, ce n'est pas toujours facile de faire comprendre l'impact d'un projet culturel dans le développement urbain.

00:14:32
Yvon: Ce n'est pas toujours facile à l'expliquer…

00:14:36
Yvon: …mais c'est extrêmement important et on l'a vu dans le quartier Saint-Roch à Québec, on le voit à New York, dans Soho, à Chelsea, on le voit un peu partout dans le monde.

00:14:52
Julie: Puis vous avez parlé des arts visuels, est-ce que les Ateliers du Ruisseau sont ouverts aussi aux autres disciplines artistiques ?

00:15:00
Yvon: C'est avant tout les arts visuels, les métiers d'art et les arts numériques.

00:15:06
Yvon: Ça, c'est un champ qui est assez nouveau.

00:15:09
Yvon: On le fait beaucoup avec Diamond, un centre d'artistes de la filature.

00:15:17
Yvon: Il y a beaucoup d'inconnus là.

00:15:20
Yvon: Y aura-t-il d'autres disciplines ?

00:15:24
¨Yvon: Peut-être.

00:15:26
Yvon: Est-ce qu'ils vont être à demeure dans les ateliers ?

00:15:31
Yvon: Ce sera à voir, c'est aux artistes à déterminer ça.

00:15:36
Yvon: Nous, on offre des lieux, mais il faut que ça réponde à des besoins.

00:15:45
Yvon: Ça a toujours été le premier critère, répondre à des besoins.

00:15:49
Yvon: Alors, c'est possible, mais c'est avant tout pour répondre aux besoins des artistes en art visuel.

00:15:57
Yvon: Il ne faut pas l'oublier.

00:16:00
Julie: Vous en avez parlé un peu, mais si on vous demandait, c'est quoi les principales forces de l'organisation?

00:16:06
Julie: Ce serait quoi selon vous?

00:16:08
Yvon: Je pense que c'est l'ancrage régional…

00:16:11
Yvon: …l'ancrage régional, la participation citoyenne, la participation des artistes et même des amateurs d'art.

00:16:23
Yvon: C'est l'ancrage régional.

00:16:25
Yvon: Un projet d'économie sociale comme le nôtre, sa fonction c'est de répondre aux besoins de la communauté avant de répondre aux besoins des actionnaires.

00:16:34
Yvon: La première force, c'est celle-là, c'est sûr.

00:16:38
Yvon: À la fois institutionnelle, la ville collabore et elle est partie prenante, mais parce qu'elle sait très bien que ça répond à un ensemble de besoins de la communauté locale.

00:16:56
Yvon: C'est l'ancrage régional, ça c'est sans aucun doute.

00:17:00
Julie: Oui, puis on le sent cet ancrage-là lorsque vous parlez des retombées, puis le dynamisme que ça amène à tout l'écosystème culturel dans la région.

00:17:10
Yvon: Effectivement, et puis on ne sait pas, parce qu'on imagine, on espère, mais on ne sait pas vraiment comment va répondre le secteur privé, le secteur communautaire, le secteur associatif.

00:17:27
Yvon: Comment ils vont répondre à l'implantation sur le terrain qu'on a choisi, qui est tout juste en face des BDT.

00:17:38
Yvon: On identifie encore ce terrain-là par les brasseurs du temps, même si c'est fermé.

00:17:44
Yvon: C'est un terrain qui est situé en plein centre-ville, au bout de la 50…

00:17:51
Yvon: Et puis, c'est un bâtiment signature, c'est un bâtiment tout en bois pour rappeler que l'Outaouais s'est développé avec l'industrie du bois.

00:18:06
Yvon: La première raison, la raison principale, je dirais, du choix du bois pour la construction, c'est celle-là.

00:18:18
Yvon: Il y a des incidences sur les changements climatiques et tout, mais c'est d'abord pour dire au monde : l'industrie du bois a été le fondateur de l'Outaouais.

00:18:31
Yvon: Philemon Wright est arrivé comme fermier, mais il a très vite compris que le blocus de Napoléon, pour l'importation du bois de la Russie, ça favorisait les grands pins de l'Outaouais.

00:18:47
Yvon: Alors, c'était l'industrie du bois.

00:18:50
Yvon: Il faut le rappeler, ça.

00:18:51
Yvon: Et on va le dire aussi, j'aime beaucoup les panneaux d'interprétation qu'on place pour expliquer ces choses-là.

00:19:03
Yvon: Il ne faut pas oublier ça.

00:19:05
Yvon: La mémoire, c'est important.

00:19:06
Julie: Donc, si je comprends bien, il y a aussi une vocation d'éducation et de préservation du patrimoine dans ce projet-là?

00:19:14
Yvon: Oui, tout à fait, et c'est lié à l'industrie du bois, c'est lié à tout ce qui constitue l'Outaouais maintenant.

00:19:24
Yvon: Maxime Pedneau-Jobin faisait une chronique sur les McLaren et les incidents de Buckingham…

00:19:36
Yvon: …pour la grève des ouvriers, c'est ça, c'est tout ça qu'un projet comme celui-là, le choix du bois, doit rappeler tout ça, y compris les Allumettières, vraiment.

00:20:01
Julie: Puis je suppose qu'avec un projet d'aussi grand d'envergure, vous devez faire face à certains défis.

00:20:07
Yvon: Oh, oui.

00:20:08
Yvon: D'abord parce qu'on a vu grand.

00:20:11
Yvon: Tant qu'à réaliser un projet comme celui-là, autant lui donner une bonne voilure.

00:20:22
Yvon: Le fait que ce soit un projet important, plusieurs dizaines de millions, c'est sûr que ça prend plus de temps…

00:20:30
Yvon: …à réaliser le montage financier.

00:20:33
Yvon: Ça, c'est le principal défi, même si on sent que la pente de l'esprit des décideurs va dans le bon sens.

00:20:43
Yvon: On sent qu'on a un bon appui, mais c'est un sacré défi parce que c'est un projet citoyen, ce n'est pas un projet qui vient de la ville, ce n'est pas un projet qui vient du gouvernement du Québec ou du gouvernement fédéral.

00:21:00
Yvon: C'est un projet citoyen, issu de la base, pour répondre à un besoin, ou à des besoins.

00:21:08
Yvon: Alors, c'est sûr que c'est plus difficile, il faut démontrer…

00:21:12
Yvon: …100 fois sur le métier.

00:21:15
Yvon: C'est parfois usant, c'est parfois difficile, en particulier pour les membres du conseil d'administration.

00:21:22
Yvon: J'ai expliqué ça à nos amis de la CDR, à quel point c'est essoufflant.

00:21:31
Yvon: C'est un des défis aussi.

00:21:33
Yvon: En économie sociale, les gros projets demandent des coureurs de fonds, des marathoniens, parce qu'on vient de changer de président, mais Benjamin Rogers était là depuis six ans.

00:21:50
Yvon: Et puis, ça demande aussi de la part de ces artistes de mettre un peu de côté leurs pratiques pour donner du temps à un projet.

00:22:02
Yvon: Alors, ça, c'est aussi un défi.

00:22:05
Yvon: Mais on espère qu'avec un peu de financement qui s'en vient, on va pouvoir embaucher quelqu'un ou des ressources qui vont soulager un peu la charge de travail des artistes membres du conseil d'administration.

00:22:24
Yvon: Il y a beaucoup de défis, mais ces deux-là, le financement puis la difficulté ou l'essoufflement des membres du CA, ce sont des défis importants à considérer.

00:22:37
Julie: Il y a combien d'artistes qui s'impliquent.

00:22:40
Julie: Dans ce projet-là en ce moment?

00:22:41
Yvon: Plusieurs dizaines.

00:22:42
Yvon: Je n'ai pas le chiffre exact, mais plusieurs dizaines.

00:22:49
Yvon: Et même si les artistes ne sont pas membres en règle de la coop, ça ne veut pas dire qu'ils sont étrangers au projet.

00:23:00
Yvon: Et ça, c'est autant pour des artistes qui sont à Gatineau que ceux qui sont dans le Pontiac dans la vallée de la Gatineau ou dans le reste de l'Outaouais, on sent un appui formel très important.

00:23:17
Julie: Puis maintenant, si on regarde un peu plus largement l'économie sociale comme telle au Québec, puis en Outaouais, depuis les dernières années, il y a quand même eu une croissance importante pour ce type d'économie-là.

00:23:28
Julie: Selon vous, comment est-ce qu'on pourrait expliquer cette croissance-là ou cet attrait envers l'économie sociale au Québec?

00:23:35
Yvon: Bien, c'est une bonne question parce que la caractéristique de l'économie sociale, c'est de répondre aux besoins des citoyens qui exposent un problème et non pas l'opportunité financière, l'opportunité de profit qui peut en résulter.

00:23:58
Yvon: Alors, c'est d'abord répondre aux besoins des gens. Puis, je suis toujours fasciné par les nouvelles cohortes qu'on voit à la CDR…

00:24:12
Yvon: …parce qu'il y a des coopératives, il y a des associations, des OBNL qui se forment dans des domaines où je n'aurais jamais pensé qu'on peut créer une coopérative pour répondre aux besoins.

00:24:27
Yvon: Il y en a une en particulier pour les nouvelles mamans, les postes parturientes qui viennent de notre monde des enfants, créer une coop pour les réunir. J'aurais pensé une association, mais non, c'est une coopérative, ils font des activités, ils font des activités de financement...

00:24:53
Yvon: Ça, c'est assez nouveau, en fait, à ma lecture. Si je reprends les critères de mon MBA, la maîtrise en administration des affaires, et je pense parfois aux profs qui nous enseignaient à l'époque, s'ils voyaient ça, les types d'entreprises qu'on crée pour répondre à des besoins qui sont là, qui sont bien identifiés.

00:25:23
Yvon: Mais on crée une entreprise pour ça.

00:25:26
Yvon: Ça, c'est assez fascinant de voir.

00:25:30
Yvon: Et on ose.

00:25:33
Yvon: Peut-être qu'avant, les besoins étaient là, mais on n'osait pas le faire.

00:25:37
Yvon: Mais là, maintenant, avec tout le mouvement et la légitimité, si on veut, de l'économie sociale dans les entreprises, dans le marché économique, bien, maintenant, on ose, puis on le réalise, on le fait.

00:25:56
Yvon: Alors qu'auparavant, peut-être que les besoins étaient là, mais on le faisait pas.

00:26:01
Yvon: C'est un mouvement, l'économie sociale, c'est un mouvement. C'est un mouvement d'idées, c'est un mouvement qui est parallèle au secteur privé et dont la mission est de répondre aux besoins des gens.

00:26:18
Yvon: Et ça, c'est assez fascinant.

00:26:20
Julie: Puis d'après vous, dans les prochaines années, est-ce que la croissance va se poursuivre?

00:26:25
Yvon: Ah oui, parce que l'économie, c'est d'abord pour combler les besoins. Il y a des opportunités d'affaires qui sont intéressantes et qui portent sur les épaules du secteur privé, puis on peut comprendre ça.

00:26:46
Yvon: Mais le développement de d'autres besoins qui sont plus sociaux, ça c'est nouveau.

00:26:54
Yvon: Nous autres, par exemple, un des effets de réunir autour de 45 ateliers d'artistes, c'est de rompre l'isolement des artistes.

00:27:07
Yvon: L'artiste, c'est un entrepreneur, mais la plupart du temps, neuf fois sur dix, il est seul.

00:27:16
Yvon: Il est seul devant son œuvre.

00:27:19
Yvon: Il entreprend sans études de marché, sans aller voir si ça va marcher.

00:27:26
Yvon: Il crée.

00:27:27
Yvon: Mais quand il se sent appuyé, il sent l'appui des autres.

00:27:34
Yvon: Je l'ai vu, en particulier à Montréal, sur la rue Perdonnet, il y a quelques installations d'ateliers là-bas.

00:27:44
Yvon: Et puis, on les voit partager leur enthousiasme ou partager leur projet de création avec d'autres.

00:27:55
Yvon: Et ces artistes ne sont pas avares de leurs idées, de leurs idées ou de leurs projets.

00:28:03
Yvon: Ils le communiquent facilement.

00:28:05
Yvon: Mais s'ils sont seuls, disons que c'est plus hasardeux.

00:28:11
Yvon: Alors que quand ils le communiquent avec d'autres, puis qu'ils voient que ça répond, puis que c'est une bonne idée… Rompre l'isolement, c'est aussi un effet indirect, mais tellement important.

00:28:29
Yvon: Je l'ai entendu à plusieurs reprises, surtout quand je faisais l'étude pour la ville de Gatineau, pour les ateliers d'artistes.

00:28:39
Yvon: Moi, je pense que ça va se poursuivre, en effet.

00:28:42
Yvon: Ça va se poursuivre parce qu'il y a un élan qui est donné et il y a aussi des mécanismes, des institutions comme la CDR qui sont à l'affût et qui sont là pour promouvoir ce mouvement de respect des besoins de la population qui se transforme en entreprise et pour appuyer ces développements-là.

00:29:13
Julie: Pour conclure, Yvon, pouvez-vous nous dire comment vous entrevoyez l'avenir pour les ateliers du ruisseau?

00:29:20
Yvon: On espère que ça va se réaliser, que ça va se poursuivre.

00:29:26
Yvon: D'abord que ça va se réaliser, que l'enthousiasme qu'on sent pour le projet va mobiliser les artistes pour continuer d'appuyer et de marquer le pas pour que ce projet répondre à leurs besoins, mais aussi, on va le sentir aussi avec la ville, avec les amateurs d'art, avec, tu sais, et plein de ressources qui vont se mettre en place.

00:30:01
Yvon: Par exemple, j'avais croisé un jour, comment on appelle ça, il arrive en autobus au Musée de la civilisation, débarquent, font descendre les visiteurs, ils rembarquent puis ils retournent à Ottawa.

00:30:16
Yvon: Et je lui avais demandé « Mais pourquoi vous n'allez pas dans le centre-ville? »

00:30:21
Yvon: Il m'avait répondu, « Mais pour voir quoi? »

00:30:25
Yvon: Je pense qu'avec un projet comme celui-là, on va avoir des choses à montrer et on ne sait pas ce que...

00:30:32
Yvon: On ne peut pas tout prévoir les effets d'un projet comme celui-là.

00:30:38
Yvon: Peut-être que les voyagistes, c'est ce que je cherchais, les voyagistes qui viennent au Musée de la civilisation vont trouver de l'intérêt maintenant au centre-ville, puis ils vont venir visiter la galerie Montcalm qui va être là, puis qu'ils vont acheter des œuvres de nos artistes.

00:30:57
Yvon: On ne sait pas.

00:30:59
Yvon: Mais ce qui est important, c'est de mettre en place le projet Puis je pense que c'est bien parti.

00:31:09
Yvon: La ville de Gatineau, le conseil municipal, vraiment nous appuie beaucoup.

00:31:15
Yvon: Alors pour le reste, il faut laisser le temps suivre son cours et croiser les doigts.

00:31:22
Julie: Yvon Leclerc, merci beaucoup d'avoir pris le temps de nous parler du projet des ateliers du Rousseau.

00:31:26
Julie: C'était très intéressant.

00:31:26
Yvon: Merci.