Les premiers seize pour cent

Peut‑on fabriquer des plastiques biodégradables à partir de déchets alimentaires? Peut‑on lutter contre les maladies des cultures et éliminer les agents pathogènes d’origine alimentaire en utilisant simplement du peroxyde d’hydrogène, de l’ozone et des rayons UV? Oui, on peut! Rencontrez les deux lauréats du grand prix du Défi de réduction du gaspillage alimentaire dans le volet des technologies novatrices, qui ont prouvé qu’on peut le faire et bien plus encore. 

Découvrez comment Genecis Bioindustries et Clean Works luttent contre le gaspillage alimentaire et les pertes alimentaires grâce à des sciences de pointe. 

What is Les premiers seize pour cent?

Bienvenue à la série de balados d’Agriculture et Agroalimentaire Canada qui explore les idées les plus fraîches en alimentation et en agriculture. À chaque épisode, découvrez en profondeur un nouveau sujet : les nouvelles pratiques, les idées innovantes et leurs impacts sur l'industrie. Apprenez-en davantage sur le secteur agricole canadien auprès des gens qui font les percées et abattent les barrières! Producteurs et gourmets, scientifiques et hauts dirigeants, toute personne ayant un œil sur l'avenir du secteur, ce balados est pour vous!

Marie France : Kirk, as tu parfois l’impression que les personnes qui participent à cette émission nous donnent un avant goût de ce que nous réserve l’avenir?
Kirk : Oui. Nos invités et leurs innovations façonnent cet avenir. Qui pourrait être plus proche qu’on le pense.
Marie France : Et c’est d’autant plus excitant.
Kirk : Aujourd’hui, on vous raconte l’histoire de quelques innovateurs de notre secteur qui ont mis au point des technologies qui changent la donne. Dans un cas, on a commencé par faire des expériences avec un cuiseur à riz.
Marie France : Et dans l’autre cas, des expériences sur des pommes au caramel.
Kirk : Les solutions qu’ils ont trouvées auront une incidence sur l’industrie agricole. De la façon de cultiver et de manipuler les aliments à la conversion des déchets alimentaires en un plastique biodégradable utile, en passant par la lutte contre les maladies et la salubrité des aliments.
Marie France : En effet, ça change la donne!
Kirk : Alors, entrons dans le vif du sujet. Bienvenue aux Premiers seize pour cent, une série de balados qui explore les idées les plus fraîches en agriculture et en alimentation. Je m’appelle Kirk Finken, je suis votre coanimateur.
Marie France : Et je m’appelle Marie France Gagnon.
Kirk : Les exemples d’aujourd’hui se rapportent aux gagnants du volet des technologies novatrices du Défi de réduction du gaspillage alimentaire, annoncés tout récemment.
Marie France : Vous avez entendu parler du Défi à plusieurs reprises pendant notre balado. Le volet des technologies novatrices était axé sur des solutions scientifiques et techniques permettant de réduire le gaspillage alimentaire.
En tout, 238 innovateurs du Canada et du monde entier ont envoyé leur candidature. De ce nombre, on a retenu 18 demi finalistes et enfin six finalistes de partout au Canada.
Kirk : Et ces six finalistes proposaient des solutions très innovantes qui se sont démarquées.
Marie France : Oui. Les six finalistes ont un an pour faire avancer leurs prototypes et les mettre à l’essai dans un environnement opérationnel avec au moins un partenaire de mise en œuvre.
Kirk : Puis est venu le moment de briller. Les candidatures ont été évaluées selon les critères établis, notamment le volume potentiel de réduction du gaspillage alimentaire, l’efficacité de la technologie, le degré d’innovation et d’adaptabilité de même que les avantages environnementaux et économiques.
Marie France : En mai 2024, on a annoncé le nom des deux gagnants.
Kirk : Chacun d’eux recevra un financement pouvant aller jusqu’à un million de dollars pour accélérer l’avancement de ses solutions et favoriser leur déploiement sur le marché canadien. Marie-France, tu peux nous faire le roulement de tambour qu’on a utilisé au dernier épisode.
Marie France : Oui (roulement de tambour)
Kirk : Les deux gagnants du volet des technologies novatrices du Défi de réduction du gaspillage alimentaire sont...
Marie France : Genecis Bioindustries de Toronto et Clean Works de St. Catharines, deux entreprises de l’Ontario!
Kirk : J’ai rencontré un représentant de Genecis.
Marie France : J’ai rencontré un représentant de Clean Works.
Kirk : Voici leurs histoires, en commençant par Genecis et sa PDG et fondatrice, Luna Yu.
Luna : J’ai obtenu un baccalauréat et une maîtrise en sciences de l’Université de Toronto. J’ai terminé ces programmes en quatre ans. J’ai toujours aimé l’environnement et la biologie. Après avoir obtenu mon diplôme, j’ai tout de suite fondé Genecis parce que je voulais vraiment comprendre comment on pouvait utiliser la biologie pour créer quelque chose de nouveau et de meilleur. J’ai eu l’occasion de travailler avec l’industrie du biogaz pendant ma maîtrise et j’ai vu qu’elle convertissait essentiellement les déchets alimentaires, donc des déchets, en une ressource. On voulait vraiment voir ce qu’on pouvait faire d’autre en convertissant les déchets alimentaires en quelque chose ayant plus de valeur. C’est ainsi que Genecis a vu le jour.
Marie France : C’est l’esprit créatif et entrepreneurial qui est à l’œuvre!
Kirk : Attends de connaître leur nouvelle solution technologique.
Luna : Chez Genecis, on a recours à la biotechnologie industrielle, c. à d. simplement des bactéries modifiées, pour convertir différents types de matières premières, y compris des déchets alimentaires, industriels et médicaux, en plastiques biodégradables à base de PHA.
Kirk : Modifier des bactéries? Comment faites vous ça?
Luna : À vrai dire, c’est très simple. L’essentiel du travail consiste à identifier les parties de l’ADN à modifier pour réussir à changer ce qu’on souhaite changer. C’est donc plutôt un travail d’analyse, non?
Luna : Les bactéries sont très utiles pour produire des éléments qu’il est difficile de fabriquer naturellement ou par synthèse chimique. Et plus il y a d’étapes, imaginez une usine de produits chimiques, plus ça coûterait cher à produire chimiquement. C’est donc en utilisant des bactéries qu’on tire le maximum en quelques heures, en une seule étape, c. à d. essentiellement par fermentation dans son organisme, puis en effectuant plusieurs procédés chimiques.

Luna : Mais pour ce qui est de modifier les bactéries à proprement parler, il y a les trousses CRISPR pour ça. C’est littéralement une toute petite boîte. Et vous pouvez utiliser la trousse ou les articles qu’elle contient, soit essentiellement une pipette ordinaire, une centrifugeuse, etc., pour modifier l’ADN. On dirait de la science fiction, mais les outils d’aujourd’hui ont démocratisé énormément le procédé et l’ont rendu très facile d’accès. Vous pouvez acheter ces trousses pour quelques centaines de dollars maximum. Techniquement, si vous le voulez, vous pouvez créer des bactéries dans votre propre cuisine.
Kirk : En parlant de cuisine, j’ai entendu dire que votre premier essai avait été réalisé avec un appareil qu’on pourrait trouver dans notre propre cuisine.
Luna : Lors de notre premier essai, on voulait vraiment pouvoir fermenter les bactéries et les nourrir avec des déchets alimentaires pour qu’elles puissent produire des bioplastiques. À l’époque, on n’était qu’une bande de jeunes diplômés. On n’avait donc pas accès à des bioréacteurs, à des laboratoires adéquats ou à quoi que ce soit d’autre. Et un bioréacteur ordinaire coûte au moins 20 000 $. Alors on s’est demandé comment reproduire l’essentiel d’un bioréacteur avec des ressources beaucoup moins chères. On s’est donc demandé ce qui s’en rapprochait le plus. On a d’abord pensé à un autocuiseur. Et on a essayé un autocuiseur. Dans un premier temps, on a percé des trous, installé les capteurs, les mélangeurs, etc.
Luna : Mais on s’est vite rendu compte que l’autocuiseur chauffait beaucoup trop vite et qu’il tuait une grande partie des bactéries. On est allé acheter un cuiseur à riz chez Canadian Tire et on l’a adapté en se servant d’Arduino et Raspberry Pi pour le contrôle de l’automatisation. Il nous a fallu environ un mois et demi pour y parvenir. Et le tout premier a plutôt bien fonctionné. On a donc fini par en acheter six autres et en adapter six autres pour avoir six cuiseurs à riz qui fonctionnaient en parallèle. C’est au cours de cet été là qu’on a produit nos deux premiers grammes de PHA à partir de déchets alimentaires fermentés en utilisant ces cuiseurs à riz réacteurs. C’était une excellente validation de concept. C’était un moment très excitant.
Kirk : Oh, sûrement. Bon, alors maintenant, quelques années plus tard, et après le défi, pouvez vous décrire votre laboratoire aujourd’hui? J’imagine que c’est un peu différent.

Luna : Oh, notre laboratoire est maintenant définitivement beaucoup plus près de l’idée qu’on se fait d’un laboratoire. On a un laboratoire d’environ 4000 m² dans le centre ville de Toronto. On y trouve beaucoup de matériel génial, des bioréacteurs, dignes de ce nom. On a aussi une installation pilote à Scarborough. Oui, c’est nettement plus professionnel que les cuiseurs à riz.
Kirk : Et vous pouvez maintenant fabriquer plus de deux grammes de PHA?
Luna : Oui, tout à fait.
Marie France : Kirk, est-ce que je peux t’interrompre un instant? J’adore cette histoire, mais un PHA, c’est un type de plastique?

Kirk : Je me suis aussi posé cette question. PHA signifie « polyhydroxyalcanoate », en un seul mot, et laisse moi ou plutôt laissons Luna l’expliquer.

Luna : Un PHA n’est en réalité qu’une graisse de bactéries. De nombreuses bactéries fabriquent naturellement des PHA pour stocker de l’énergie lorsqu’elles ont des excédents alimentaires. Tout comme les humains; nous stockons de l’énergie sous forme de cellules graisseuses. Elles stockent l’énergie sous forme de PHA. Et il se trouve qu’une fois extraits de la bactérie, ils se comportent presque exactement comme le plastique. On peut donc les mouler, les chauffer, les étirer, les transformer en minces pellicules, en gobelets, en comprimés, etc. L’avantage des PHA, c’est qu’une fois moulés en produits plastiques et rejetés dans la nature, selon leur épaisseur, ils vont se dégrader. S’ils sont très fins, cela prend moins d’un an dans les milieux marins et pédologiques, et jusqu’à deux ans s’ils sont très épais. Par rapport aux plastiques à base de pétrole, il s’agit d’une amélioration considérable, car il faut au moins 500 ans aux plastiques à base de pétrole pour se décomposer.
Kirk : Dire que c’est considérable est peut être un euphémisme. Quel genre de déchets alimentaires utilisez vous?
Luna : Au départ, on les obtenait des restaurants. On avait l’habitude d’aller dans les conteneurs verts des restaurants et de creuser, de pelleter les déchets alimentaires. Heureusement, on n’a plus besoin de faire ça. À vrai dire, on se les procure directement auprès des usines de biogaz avec lesquelles on travaille en partenariat. En général, elles reçoivent au moins des centaines de tonnes de déchets alimentaires par jour. Il y a donc une offre excédentaire à l’heure actuelle.
Kirk : J’entends souvent le mot « on » dans votre histoire. Pouvez vous me parler de votre équipe?

Luna : Notre équipe est composée de personnes extrêmement dévouées. Beaucoup de gens viennent d’horizons différents, mais on est tous là pour réfléchir à la manière de rendre le monde meilleur et de le faire d’une façon cohérente et qui puisse évoluer financièrement vers quelque chose de plus en plus grand, afin d’amplifier notre impact.
Kirk : Qu’en est il des autres partenaires, des partenaires de recherche?
Luna : On travaille beaucoup avec l’Université de Toronto. L’Université de Waterloo, de Guelph et plusieurs autres. On a beaucoup de chance d’avoir le soutien d’un groupe d’investisseurs extraordinaires, dont Khosla Ventures, qui est aussi le plus gros bailleur de fonds d’Impossible Foods, d’OpenAI et de quelques autres entreprises vraiment géniales. Amazon, le Fonds pour l’engagement climatique d’Amazon, c’est formidable de pouvoir compter sur ces entreprises; elles ont beaucoup d’excellentes ressources qui nous aident à la fois sur le plan commercial et sur le plan de l’acquisition de talents.
Kirk : Maintenant, la grande question : Où allons nous voir les premières applications de votre bioplastique?
Luna : Ce sera dans la catégorie des produits de consommation, et j’espère pouvoir vous en dire plus bientôt. Mais ce sera quelque chose que les gens utiliseront au quotidien. On va lancer le projet au cours des prochains mois. En attendant, on garde cette information sous embargo.
MF : J’aime le mystère, mais je suis très impatiente de voir ce que l’entreprise nous réserve. Ainsi, Kirk, alors que Genecis utilise des déchets alimentaires pour créer un autre produit de valeur, l’autre finaliste s’emploie à réduire les pertes alimentaires dans le système, de la ferme au magasin en passant par le transformateur.
Kirk : Ça a l’air énorme.
MF : Leur technologie permet également de décontaminer les aliments, comme les pommes, ce qui permet d’éviter les rappels d’aliments et l’énorme gaspillage qui en résulte.
Kirk : Ça commence aussi à ressembler à une solution miracle.
MF : En réalité, c’est le cas à bien des égards. L’entreprise Clean Works s’apprête à faire quelque chose de très intéressant. Mais je voudrais d’abord te montrer une petite vidéo. Peux tu décrire ce que tu vois?
Kirk : Ça ressemble à une vendangeuse qui passe dans les rangs d’un vignoble la nuit... Mais ce qu’il y a en dessous est vraiment particulier. La meilleure façon dont je pourrais décrire la chose, c’est...un scanneur géant? Ces panneaux lumineux qui font face aux plants... et qui ont un aspect très futuriste.
Marie France : C’est l’une des technologies avant la récolte mises au point par Clean Works dans le cadre du Défi. On va publier la vidéo.
Kirk : J’imagine que tu vas nous expliquer ce que fait cette chose, n’est-ce pas?
MF : Eh bien, le mieux c’est d’obtenir l’information à la source et de transformer la science fiction en faits scientifiques. J’ai eu le plaisir de m’entretenir avec Denise Van De Veen, directrice du développement commercial chez Clean Works.
Marie France : Denise, pouvez vous décrire la technologie que Clean Works met au point pour l’industrie des fruits et légumes? Dans des mots que je peux comprendre parce que je ne suis pas ingénieure.
Denise : Je ne le suis pas non plus donc je suis probablement la personne la mieux placée pour essayer de la décrire. Notre technologie intègre un micro brouillard de peroxyde d’hydrogène ainsi que de l’ozone et des rayons ultraviolets. La combinaison de ces trois éléments produit ce qu’on appelle un radical hydroxyle. Les radicaux hydroxyles sont incroyablement antimicrobiens et oxydants, ce qui les rend très efficaces pour éliminer des microorganismes nuisibles tels que les agents pathogènes, les virus, les moisissures et le mildiou. Mais l’avantage des radicaux hydroxyles est qu’ils redeviennent de l’oxygène et de l’eau, ce qui signifie qu’on ne laisse pas de résidus nocifs et qu’on ne crée pas de sous produits.
Pour ce défi, on a créé deux appareils. L’un d’eux ressemble à une remorque derrière un tracteur. C’est ce qu’on a utilisé dans le champ d’épinards. Il semble moins tenir de la science fiction que celui qui se trouve sur la vendangeuse.
Denise : Celui sur la vendangeuse était un peu plus intéressant. Mes ingénieurs diraient probablement qu’il s’agit plutôt d’un défi de génie mécanique. Parce que la vendangeuse passe sur les vignes. On devait trouver un moyen de fixer l’appareil à la vendangeuse tout en veillant à ce qu’il passe partout sur les vignes. Et ces vignes vont atteindre différentes tailles et différentes hauteurs. Mais l’appareil est orienté vers les vignes, de sorte que le traitement se fait des deux côtés.
Marie France : J’ai hâte de montrer à d’autres personnes la vidéo que vous m’avez envoyée. On dirait un film de science fiction.

Denise : Je vous remercie. Oui, ça tient un peu de la science fiction.
Marie France : Je crois comprendre que l’origine de ce procédé est assez intéressante. Il s’inspire de pommes au caramel?
Denise : Oui, je trouve qu’on a une belle histoire. Court Holdings et Paul Moyer sont les propriétaires de Clean Works. Paul Moyer et sa famille pratiquent l’agriculture dans la région de Niagara depuis 1799. Grâce à l’aide de ses partenaires, Court Holdings, il a diversifié ses activités pour produire des pommes au caramel. En 2016, il y a eu une éclosion de listériose. C’était horrible et même si l’entreprise Moyer’s Apples n’était pas concernée par l’éclosion, il n’y avait aucun doute qu’il fallait trouver une solution.
Denise : Et bien sûr, il fallait trouver une solution sans eau, car on ne peut pas enrober de caramel une pomme mouillée. En collaboration avec Keith Warriner de l’Université de Guelph, le procédé des radicaux hydroxyles a été mis au point après des années d’essais et de validations. Cette solution maintenant brevetée a si bien fonctionné pour l’industrie des pommes au caramel que Court Holdings et Paul Moyer ont décidé de la commercialiser et de la mettre à la disposition de l’industrie des fruits et légumes du monde entier.
Kirk : Marie France, à mon tour de demander une petite précision. Qu’est ce qu’un radical hydroxyle?
Marie France : Il a aussi fallu que je pose cette question à Denise. Les radicaux hydroxyles sont créés en combinant des rayons UV, de la vapeur de peroxyde d’hydrogène et de l’ozone gazeux. Il s’agit d’agents antimicrobiens à courte durée de vie qui peuvent inactiver et tuer, par exemple, des bactéries et des spores de moisissures. Denise a donné un bon exemple.
Denise : Notre technologie fait la même chose que dans le cas de la couche d’ozone, en empêchant les polluants de s’échapper et d’endommager la couche d’ozone. Donc, on prend le gaz, la lumière du soleil, et on crée quelque chose qui détruit les méchants pathogènes et les méchantes moisissures sur vos aliments.
Marie France : Kirk, ce qu’il faut comprendre, c’est que la technologie de Clean Works est utilisée pour les cultures, mais il existe des applications possibles pour les protéines, par exemple dans la transformation des œufs, de la viande et des fruits de mer.
Kirk : Attends une seconde. Je sais qu’on l’a déjà dit plusieurs fois, mais ça change la donne!
Marie France : Absolument!
Kirk : Quiconque travaille dans le domaine de l’agriculture en déduira rapidement que cette solution permettra non seulement d’augmenter le rendement - parce qu’on sait qu’il y aura plus de produits comestibles provenant des champs, plus de produits à vendre pour les agriculteurs - mais aussi de prolonger la durée de conservation de ces fruits et légumes. Mais les industries des protéines aussi! La réduction des agents pathogènes d’origine alimentaire comme moyen de réduire les rappels d’aliments, qui sont d’énormes sources de gaspillage alimentaire.
Marie France : C’est de la magie, l’oxygène et l’eau sont le seul sous produit de la technologie.
Kirk : Je suis renversé. Continue, s’il te plaît! J’aimerais entendre d’autres extraits de cette entrevue.
Marie France : Comment le Défi vous a t il aidé à mettre cette technologie au point?
Denise : C’est le Défi qui nous a donné l’idée de ce projet. Notre technologie la plus au point est celle pour après la récolte. On crée des tunnels qui peuvent s’intégrer tels quels dans les chaînes de production. Donc on place un tunnel au dessus d’un convoyeur, d’une table vibrante ou d’un lit de brosses, et on fait passer les fruits ou les légumes dans ce tunnel qui crée assez d’espace et assez de mouvement pour que la décontamination en phase gazeuse se fasse tout autour des fruits ou des légumes.
Denise : Pour ce Défi, on a pu s’intéresser à l’étape avant la récolte. Il s’agissait donc de reprendre l’idée du tunnel, mais en le créant ou en le fabriquant d’une manière qui permettait de le fixer à des outils agricoles courants, afin de pouvoir l’utiliser directement au champ.
Denise : Le fait que c’était un défi pluriannuel nous a vraiment aidés à nous attaquer au problème par petits morceaux, à élaborer un meilleur plan de mise en marché et à nous donner le temps et l’espace nécessaires pour être certains d’avoir le soutien scientifique nécessaire. On a les bons partenaires, non seulement sur le plan scientifique, mais aussi sur le plan de l’ingénierie, pour comprendre comment ces outils agricoles fonctionnent dans les champs, et même comment le vent peut les influencer.
Denise : Si on n’avait pas eu les différentes saisons et le processus par étapes permis par ce défi, je ne sais pas si on aurait pu développer le projet de la même manière.

Denise : Il nous a aussi aidés à trouver les bons partenaires, c’est à dire les partenaires de recherche avec qui on voulait travailler. En soi, ça a été très utile pour nous. On a véritablement développé nos relations avec le Centre de recherche et d’innovation de Vineland. Enfin, l’intérêt et la sensibilisation suscités par ce défi sont indéniables.
MF : Avez vous d’autres partenaires de recherche?
Denise : La recherche a commencé à l’Université de Guelph, où on a étudié les radicaux hydroxyles, la façon dont les UV et le peroxyde d’hydrogène interagissaient, puis on a travaillé avec Clean Works et ajouté l’ozone pour voir l’efficacité s’améliorer. Elle possède un appareil dans son laboratoire. Elle est donc en mesure de faire de nombreux tests et de comprendre comment ça fonctionne, ce qui fonctionne, quels sont les meilleurs paramètres pour que ça fonctionne. Indéniablement, elle a donc joué un rôle crucial dans la recherche scientifique à l’origine de Clean Works. On a aussi travaillé en étroite collaboration avec l’Université McMaster, en particulier, pendant la pandémie. Elle possède un laboratoire de niveau 3 où il a été possible d’examiner certains virus et autres organismes du même genre. On travaille avec l’Université du Manitoba et on a aussi une unité expérimentale à l’Université Dalhousie.
Marie France : Dans l’émission, on réserve une place spéciale dans nos cœurs aux personnes qui se lancent afin d’essayer quelque chose de nouveau avant l’heure. Pouvez vous nous parler de vos premiers utilisateurs?
Denise : Oui. Nos premiers utilisateurs sur le plan de la pré récolte, dans le domaine du vin, sont Vineland Estates. D’une part, Alan et Brian Schmidt ont une connaissance approfondie de la viticulture et de l’industrie du vin. Et d’autre part, E. et J. Collins sont géniaux. À l’origine, on travaillait avec eux à l’étape après la récolte, c’est à dire qu’on vérifiait leurs épinards une fois récoltés et qu’on les décontaminait avant qu’ils ne soient transformés. On a commencé à parler d’un projet sur le terrain, et ils ont immédiatement levé la main et dit qu’ils voulaient en faire partie.
Marie France : C’est un outil très utile que les producteurs doivent avoir dans leur boîte à outils.
Denise : Oui, sans aucun doute. Je veux dire, on l’a même vu la saison dernière. L’automne a été très humide et beaucoup de nos partenaires dans les vignobles nous ont dit qu’ils avaient déjà atteint leur limite d’utilisation de produits chimiques. Ils ne peuvent utiliser qu’une quantité limitée au cours d’une saison, et il leur aurait fallu laisser leurs plants sans protection pendant les derniers mois, lorsque le temps est très pluvieux. Il a donc paru évident qu’il fallait trouver une solution différente pour les producteurs.
MF : Comment les acteurs de l’industrie réagissent ils à cette nouvelle technologie?
Denise : Jusqu’à présent, les producteurs, les transformateurs et même les détaillants avec lesquels on travaille ont réagi très favorablement. Bien sûr, on s’est concentré sur les légumes feuilles et le vin, mais on a maintenant des partenaires qui s’intéressent aux fraises, aux brocolis et aux choux fleurs. Les agronomes, en particulier. Je pense que c’était à l’automne de l’an dernier, le secteur Hamilton Niagara de l’Ontario Institute of Agrologists, l’OIA, nous a invités à présenter un exposé lors de la réunion de son secteur, et les réactions et commentaires de ce groupe ont été formidables.
Marie France : C’est chouette. Alors, quelles sont les prochaines étapes?
Denise : On va poursuivre la recherche cette saison dans les champs avec nos partenaires commerciaux et nos partenaires de recherche. Et puis Wendy McFadden Smith, de l’Université Brock, vient nous rejoindre à Vineland Estates. On envisage de lancer ce produit sur le marché l’année prochaine.

Kirk : Marie France, c’est incroyable!
Marie France : Il faut savoir qu’ils peuvent utiliser leurs technologies et qu’ils vendent leur solution à des entreprises de transformation des aliments et même à des détaillants. Ils peuvent se servir de leur technologie pour décontaminer les bacs réutilisables utilisés dans l’industrie alimentaire, et tout équipement dans une installation de transformation. C’est extraordinaire.
Kirk : Sans blague. Je suis impressionné par Genecis et Clean Works!
Marie France : Comme on l’a déjà dit, il y avait six finalistes. Les quatre autres finalistes proposaient chacun des technologies très différentes. Eux aussi, ils sont extraordinaires.
Kirk : Ils le sont et ils méritent aussi une bonne main d’applaudissements. Les déchets alimentaires sont utilisés à bien d’autres fins. ALT TEX les utilise pour créer des textiles biodégradables et carboneutres destinés à remplacer le polyester. Aruna Revolution Health crée des produits d’hygiène féminine à partir de ce produit. Carbon Lock Tech convertit les déchets alimentaires en une forme stable de biocarbone qui séquestre le CO2 atmosphérique et empêche les émissions futures de méthane des sites d’enfouissement. C’est une façon un peu longue de dire que l’entreprise crée ces petits morceaux de carbone et les utilisent à d’autres fins. Enfin, Chinova Bioworks Inc. a mis au point une solution utilisant les tiges de champignons pour améliorer la durée de conservation des produits alimentaires et des boissons.
Marie France : Ces entreprises prospèrent et vont de l’avant avec leurs solutions.
Kirk : Oui, j’imagine. Ça me rend fier de travailler dans ce secteur.
Marie France : Et ça me donne envie de faire ce qu’on dit à tout le monde à chaque épisode.
Kirk : Oui, en effet. Ça nous donne envie d’essayer quelque chose de nouveau.
Marie France : Comme convertir mon cuiseur à riz. Si vous n’avez pas écouté notre dernier épisode sur les autres gagnants du Défi de réduction du gaspillage alimentaire, je vous encourage vraiment à le faire. On parlait des gagnants du volet des modèles d’affaires.