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°° C’est une collection de brefs épisodes pour découvrir l’art contemporain avec curiosité et légèreté.
°° C’est un rendez-vous avec une œuvre d’art contemporain suisse, regardée, expertisée et questionnée par des jeunes, auxquels répondent à leur façon les artistes qui ont réalisé les œuvres.
°° C’est des invitations à des rencontres, parfois inattendues, entre des œuvres exposées en Suisse… et vous!
Salut, je m'appelle Timo. J'ai dix-sept ans. J'habite à Lausanne.
L'art pour moi, c'est un moyen différent d'exprimer des émotions.
Salut, je m'appelle Nora, j'ai dix-sept ans. J'habite à Lausanne.
L'art pour moi, c'est une façon de montrer le monde tel qu'il est.
Aujourd’hui, j'ai rendez-vous avec une œuvre de Vincent Kohler qui se trouve à Lausanne. Tu viens?
TIMO: Salut Nora, tu vas bien?
NORA: Bien! Et toi?
TIMO: Impeccable!
NORA: On m'a dit qu'il fallait qu'on trouve une fontaine au Flon. Tu sais où elle est?
TIMO: Ouais, je crois que c'est celle qui est au milieu de tous les bars, en face du cinéma et aussi à côté de la fameuse boîte, le MAD.
NORA: Ah! Mais, n’ est-ce pas la fontaine qu'il fallait trouver?
TIMO: Il me semble. Allons la voir de plus près!
TIMO: Du coup on voit une fontaine avec un petit fond d'eau, avec dedans plusieurs instruments qui semblent de couleur cuivrée… une sorte de métal. Et on voit que, de chacun des instruments, sortent des filets d'eau qui pourraient remplacer les câbles électriques. Par exemple, le micro, à la place d'avoir un fil qui le relie, c’est un filet d’eau qui atterrit dans le sol, dans le fond de la fontaine.
NORA: Moi je vais peut-être ajouter exactement ce qu’il y a dans la fontaine. Donc on peut voir qu'il y a plusieurs instruments. Il y a une batterie, il y a une guitare et une basse… ou deux guitares, je n'arrive pas trop à voir... Il y a aussi plusieurs enceintes et caissons, pour faire le son. Et puis, en face de ces trois instruments et enceintes, il y a le micro. Et comme l'a dit Timo, il y a des filets d'eau qui sortent de chaque instrument et des enceintes.
Moi, ce que je trouve assez drôle, c'est que c'est des instruments et c’est une œuvre sonore… Il y a du bruit; il y a du son avec l'eau qui tombe dans l'eau de la fontaine.
TIMO: On a des précisions sur l'œuvre dans la notice que Nora a dans les mains.
NORA: Il s'agit d'une œuvre qui s'appelle “Unplugged”, créée par Vincent Kohler. Elle a été réalisée en 2017 et c'est une sculpture en bronze. Ses dimensions sont celles d'instruments de musique en taille réelle.
TIMO: Après avoir lu le titre “Unplugged”, c'est le fait de débrancher que je trouve intéressant. Un autre côté que je trouve intéressant, avec cette matière que maintenant on sait que c'est du bronze, c'est qu’on voit qu'il y a un bleu qui apparaît sur certains côtés des instruments. Ce bleu, dû à la rouille du bronze, rappelle un peu une ambiance marine.
Aussi, maintenant ces instruments ont été posés là et le temps va les modifier. Ils vont prendre de la couleur, qui va même, à la limite, les rendre plus beaux que ce qu'ils étaient au début.
NORA: Je viens rarement au Flon à dix heures, quand il n'y a pas de bruit et personne dans les bars. Avec la fontaine, on a ainsi toujours un peu une sorte de bruit de fond, un brouhaha qui reste, même à dix heures. Ça rappelle un peu le soir, avec tous les gens dans les bars.
TIMO: Bon, du coup, je crois que c'est le moment où on a la chance de pouvoir poser des questions à l'artiste. La première qui me vient, c'est la fonction du bruit de l'eau qui tombe sur le fond de la fontaine et du ruissellement de cette dernière.
NORA: Pas loin de la fontaine, il y a l'école l’EJMA, qui est l'école de jazz de Lausanne. Je me demandais si l'intention de mettre des instruments était liée à l'école qui se trouve à deux pas d'ici.
TIMO: Est-ce que le choix du bronze — et que ce dernier s'oxyde au fur et à mesure du temps et que du coup une dimension temporelle apparaisse — est-ce voulu?
NORA: Est-ce que la taille des instruments veut dire quelque chose? Comme ils sont à taille réelle, sont-ils là pour se projeter… ou peut-être au début, y a-t-il eu un concert dans la fontaine ou quelque chose comme ça? Ou bien, Vincent Kohler, est-ce que vous êtes musicien?
TIMO: C'est très drôle, parce qu'en plus, actuellement il pleut et on est réfugiés sous un abri. Et le bruit de la pluie rappelle parfaitement celui de l'œuvre. Voilà petite anecdote de la situation géographique que nous avons en ce moment. Et la pluie suscite une question: l'œuvre a-t-elle un rapport avec le Flon, cette fameuse rivière qui passe encore en dessous et à travers Lausanne? Cette œuvre a été placée sur la place du Flon, qui tire son nom de cette rivière… est-ce que ça a un rapport ou non?
NORA: Par rapport au titre: Pourquoi est-ce que vous avez appelé cette œuvre Unplugged?
TIMO: Est-ce que il y a un effet mélancolique du fait de débrancher les instruments, comme pour conclure une carrière, un événement ou une histoire musicale?
VINCENT KOHLER: Salut Nora! Salut Timo! Merci pour votre description et vos impressions sur ma sculpture fontaine. J’ai un peu mixé vos questions entre elles, pour pouvoir jouer ma réponse. Mais comment on va parler musique, ça ne devrait pas poser de problème!
Unplugged est une sculpture d’art public, que j’ai réalisée suite à un concours lors du réaménagement du quartier du Flon à Lausanne, et plus particulièrement de cette place centrale. Je n'ai pas dessiné le bassin en pierre, mais imaginé ce qu'il y avait dedans. Je suis artiste, on dit aussi plasticien, mais j'ai joué de la batterie durant une quinzaine d'années, joué dans différents groupes, différentes formations. Et j'ai découvert l'improvisation musicale à l’AMR à Genève, où j'ai participé à des ateliers d'improvisation. Et ça a été essentiel pour ma pratique musicale, mais surtout visuelle.
C'est certainement pour cela que j'apprécie de participer à des projets d'art public, car il y a ce challenge, déjà de s'exposer à des publics. Mais il faut aussi savoir réagir rapidement à des situations et des contextes, des commanditaires pour créer une œuvre qui fasse sens et qui ne se démode pas trop rapidement.
Ma fontaine est clairement un clin d'œil à l'histoire de ce quartier qui a toujours été infusé de musique, avec ses locaux de répétition, ses écoles de musique, ses clubs.
Il y a aussi la géographie de la rivière du Flon qui a été enfouie au siècle passé et qui coule encore sous ce quartier. Celui-ci est historiquement formé de remblais. Beaucoup d'activités se sont passées et se passent encore en sous-sol pour ensuite émerger à la surface.
L'eau, la musique, l’underground sont un peu l'ADN de ce site.
Cette place rectangulaire, le cœur du quartier du Flon, m'a fait penser à une salle de concert dont la fontaine pourrait être la scène légèrement surélevée. C'est pour cela que j'ai orienté les instruments face à cette place. Le plan d'eau permet également de créer une une limite entre le public et le groupe.
Dans mon travail, j'utilise régulièrement des artifices comme le détournement, l'absurde, l'agrandissement d'objets. Ici, j'ai juste modifié la matérialité des instruments qui sont en bronze, changé leurs fonctions en fontaine. Mais il était important pour moi de garder leurs dimensions réelles.
Afin de créer cette illusion d'un possible concert, j'ai créé un set standard de musique: basse, batterie, guitare, voix qui permet de jouer une multitude de styles de musique. J'ai voulu aussi que les musiciens reconnaissent les instruments, identifient ces références presque iconiques que sont la Fender Jazz Bass, l'ampli Twin Reverb ou encore la tête d'ampli Ampeg.
J'aime le fait qu'il y ait différentes couches de lecture et de compréhension. Si on est musicien, plombier ou un canard, on regardera cette fontaine dans notre œil.
Les instruments sont au repos, comme à l'entracte ou avant des rappels. Et il y a aussi, bien sûr, l'idée du flux musical que j'ai représenté ici, par l'eau qui coule en continu, comme le son que produirait ces instruments et ou comme un morceau continu.
Je n'ai pas voulu de jeux d'eau spectaculaires comme à Las Vegas, mais plutôt un flux continu, assez doux selon les différents instruments. Selon le son qu'ils diffusent, il y a plusieurs types de jets. Parfois, ils représentent des câbles jack, comme celui du micro. Ailleurs, c'est une lame d'eau régulière ou encore plus chaotique, comme le jet de la grosse caisse.
J'ai choisi le bronze pour son histoire, ses qualités, sa durabilité et les possibilités techniques qu'il offre. Et cela me permettait aussi d'unifier tous les éléments, tous les d'instruments, entre eux.
Entre le l'art public est un art qui vit avec le temps, les intempéries, le public… L'oxydation était donc prévue: l’aspect brillant à son inauguration en 2017 s'est peu à peu patiné, principalement où l'eau coule. La couleur bleue est cependant une surprise pour moi. C'est le genre de hasard assez heureux qui donne un sens, surtout par rapport à la musique où il y a pas mal de références à cette couleur. On pense à la note bleue, la Blue Note, le Blues etc. Mais cet aspect peut encore évoluer. C'est possible que sa couleur bleue jazz vire au noir, punk rock ou un jour redevienne dorée bling-bling, plutôt hip-hop.
Le titre Unplugged fait directement référence aux nombreuses sessions d'enregistrement acoustique. J'y vois assez peu de mélancolie ou de nostalgie, mais plutôt l'envie de calmer le jeu. Une sorte d'apaisement avant la tempête, car on sait très bien que ces instruments peuvent se réveiller et cracher leurs décibels. C'est aussi un jeu avec les mots branché, débranché par rapport à ce quartier en mutation et à ses utilisateurs.
Voilà, Nora, Timo, j'espère avoir pu répondre à vos interrogations.
Et si vous souhaitez en savoir plus, je vous invite volontiers à mon atelier pour en discuter.
A bientôt, bye-bye.
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“ART’S COOL autrement dit “Art is cool”!
C'est un rendez-vous avec une œuvre d'art contemporain suisse regardée, expertisée et questionnée par des jeunes gens auxquels répond à sa façon l'artiste qui a réalisé l'œuvre. C’est simple, non?
Durant cette deuxième saison, notre podcast vous invite à des explorations hors des lieux habituels d’exposition, le plus souvent en plein air! Chaque semaine, ou presque, nous découvrons ainsi ensemble une création artistique située dans l’espace public quelque part en Suisse.
Aujourd’hui, il a été question de titre de l'œuvre Unplugged de Vincent Kohler, examinée par le regard curieux de Nora et Timo. Ne manquez pas d’aller découvrir en vrai l’œuvre dont il était question à Lausanne, sur l'Esplanade du Flon. Commanditée par Mobimo Art, cette sculpture fait partie d'Art en ville, répertoire d'œuvres d'art dans l'espace public lausannois proposé par le Service de la culture de la Ville.
Collectionnons l'art contemporain avec nos oreilles! Le site artscool.ch rassemble tous les épisodes diffusés depuis l’automne 2021. Une collection variée et grandissante! Vous y trouverez aussi les portraits des jeunes aficionadas et aficionados d'art contemporain, les mini bio des artistes interviewés ainsi que les photos des œuvres.
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Le podcast ART’S COOL est réalisé et diffusé grâce au précieux soutien de la Loterie Romande, du Pour-cent culturel Migros, de la Fondation Oertli, de la Fondation Sandoz, des cantons de Bâle-Ville, Berne, Thurgovie, Vaud, Zoug, Zurich, ainsi que des villes d’Yverdon-les-bains, Zoug et Zurich.
Avec les voix de Florence Grivel pour la version française et de Stephan Kyburz pour la version allemande.
Musique et habillage sonore par Christophe Gonet.
C’est une production Young Pods (www.youngpods.ch).