Pour réussir un poulet

Deux jeunes hommes, Carl et Steven, survivent tant bien que mal en ramassant du fer pour Mario Vaillancourt, le propriétaire des Galeries du Boulevard. Grossier, menaçant, l’individu semble avoir sur le feu des activités plutôt louches… En tentant d’améliorer leur sort, les deux amis s’enfoncent dans une spirale qui leur fait bouffer de plus en plus de misère.

Show Notes

Deux jeunes hommes, Carl et Steven, survivent tant bien que mal en ramassant du fer pour Mario Vaillancourt, le propriétaire des Galeries du Boulevard. Grossier, menaçant, l’individu semble avoir sur le feu des activités plutôt louches… En tentant d’améliorer leur sort, les deux amis s’enfoncent dans une spirale qui leur fait bouffer de plus en plus de misère.

Pour réussir un poulet illustre avec un humour cinglant le mal de vivre d’une frange de la société qui, à force de trimer dur pour une minable pitance, finit, au pied du mur, par sacrifier l’une de ses plus grandes richesses: ses valeurs.

Texte: Fabien Cloutier
Réalisation et conception: Scène nationale du son
Musique originale: Valaire
Distribution: Denis Bernard, Gabrielle Côté, Guillaume Cyr, Marie Michaud et Hubert Proulx
Production exécutive: Stéphanie Laurin
Production: Scène nationale du son et Théâtre de La Manufacture, en collaboration avec La Fabrique culturelle

What is Pour réussir un poulet?

Deux jeunes hommes, Carl et Steven, survivent tant bien que mal en ramassant du fer pour Mario Vaillancourt, le propriétaire des Galeries du Boulevard. Grossier, menaçant, l’individu semble avoir sur le feu des activités plutôt louches… En tentant d’améliorer leur sort, les deux amis s’enfoncent dans une spirale qui leur fait bouffer de plus en plus de misère.

Pour réussir un poulet illustre avec un humour cinglant le mal de vivre d’une frange de la société qui, à force de trimer dur pour une minable pitance, finit, au pied du mur, par sacrifier l’une de ses plus grandes richesses: ses valeurs.

Épisode 4 : C'est réglé?

JUDITH GILBERT
J’suis loin d’être la seule à qui c’est arrivé
Dans vie
Tout le monde un moment donné se ramasse avec un pas d’sens
Un tout croche
« Jamais
Jamais un poulet qui a été congelé
Un poulet frais
Pis tu vas épicer en d’sous d’la peau
Faque en cuisant
Le gras d’la peau
Va faire couler le goût épicé dans l’poulet »
C’est de même qu’y a dit ça
Dans l’temps
Des gars qui cuisinaient
Ça existait presque pas
Ça m’a impressionné

MÉLISSA
T’es sûrement pas la seule à qui c’est arrivée

JUDITH GILBERT
Sûrement

CARL
Est haute de même
Même pas 4 pieds et 5
Ben ratatinée avec une ostie de permanente
Qu’on dirait un chou-fleur
Pis qu’on sait pas qu’est ce que sa coiffeuse épaisse à y’a crissé dans tête
Parce qu’à l’a les cheveux mauves
Faque là c’te vieille là
à l’essaie de se servir du guichet
Faque oublie ça la vitesse
À sait pas pantoute quoi faire devant la machine
À freak que le tabarnac
La carte dans fente du dépôt
Pis c’est long pis bip bip bip la machine itou crisse à trouve ça long
Les filles sont dans le char
Ben brûlés
On a passé la journée d’un restaurant à l’autre
J’allais même cogner des fois à des grosses maisons que je me disais
Eux autres
Y ont une entrée en inter bloc
Y doivent manger des huîtres
Ben non stie
2 caisses dans toute la journée
On est rentré dans l’char à 7 heures le matin
On a toffé ça quasiment jusqu’à noirceur
Pis on a vendu 2 caisses dans toute la journée
Ça m’a coûté plus cher de glace pis de gaz que c’que j’ai vendu
Pis là au guichet
La vieille
À sort un paquet de cash de sa sacoche
Une galette d’argent
À met comme l’argent su l’boutte de comptoir de guichet pendant qu’à cherche l’enveloppe
Pis crisse c’est épais d’même
Pis c’est pas yinque des 5 pis des 10
Y a des 20 pis des 50
Pis queques uns en plus
Je l’voé
À met ça dans l’enveloppe
À l’a pas encore réussi à faire son nip pis bip bip
Moé j’ai la patience à boute
J’ai ma journée dans l’corps
Les filles itou
Faque/

MÉLISSA
Faque quoi?

CARL
On dort à moitié pas ostie
Y’a des huîtres su des politaines dins chambres
Y a des ptites bitchs à l’école qui ont traité Lorie de poisson
Parce que son linge pue
Crisse
Le poisson ostie
Y l’appellent le poisson

MÉLISSA
Faque quoi?

CARL
J’ai pris l’argent
Je l’ai pas poussée fort

MÉLISSA
Câlisse de câlisse!

CARL
Voler des ti-vieux
C’est pas comme voler une famille
J’ai des principes crisse

MÉLISSA
Non!

CARL
Des vieux
La seule argent que ça dépense
C’est pour faire l’épicerie pis acheter quelques pelules

MÉLISSA
Arrête

CARL
Ça sort pas
Ça s’achète pas de linge parce qu’y l’usent pu
C’est pas trop dur sur une paire de culotte de passer des journées à se bercer

MÉLISSA
Tais-toi

CARL
Y’ont leu pension pis sont ben contents avec ça

MÉLISSA
Ça vire comment dans ta crisse de tête ?

CARL
Sont tout seul dans vie
Pas moé
Moé j’ai les filles
Y grandissent eux autres
Pis leux linges
Y l’usent
J’en ai besoin ben plus qu’elle de c’t’argent là

MÉLISSA
Travailler comme le monde normal font
Tu y penses pas ça ça ?

CARL
J’ai tout l’temps travailler

MÉLISSA
Non
C’est pas vrai ça
Travailler
C’est avoir tant d’heures à faire
Entre telle heure pis telle heure
Pas décider que câlisse à matin
Tu rentres pas pis qu’tu t’crisses des aut’
Parce que t’es trop ben dans ton osti d’rond d’bave
Travailler des fois
C’est s’faire chier mais l’faire pareil
C’est dur t’aimer toé
T’es mon frère
Mais crisse que c’est dur t’aimer
T’es tellement d’l’ouvrage
On pousse pas une vieille madame

CARL
Ça coûte cher en crisse la rentrée

MÉLISSA
Heille

CARL
Des espadrilles
Si ça adonne qu’y aime pas ceux qui sont en spécial
Ça coûte cher
Pis les sacs
Pis le nouveau linge
Pis le poulet sua porte c’est moé

MÉLISSA
Hein ?

CARL
Le poulet
Sua porte
De ta belle-mère
C’est moi
Je fais des affaires pour Vaillancourt depuis un boutte
Pas rien de grave là mais
C’est pôpir payant
Anyway
Pour arriver
J’ai pas le choix

MARIO VAILLANCOURT
Dis y ça là
Dis y drette c’que j’vas t’dire
Les Galeries du Boulevard
C’est pas gros
Mais c’est réputé
C’est réputé qu’icitte on orconnait l’monde
Qu’on se tient
Qu’y alle faire ses méga ventes de chaussures dans un Centre d’achat trois étages
À l’autre boutte de la ville
Qu’y alle Richard Chaussure de mon cul
J’y casse son bail
Y va être ben plus heureux dans un local
Que ses grosses employés vont avoir besoin d’aller dans l’mail pour se virer d’bord
Parce que leu câlisse de cul de vendeuse de chaussure est trop large
Pis qu’y va y couter trois fois l’prix son local
À côté d’une crisse de halte bouffe
Avec 10 ptites crisses de chaînes
Qui vont y vendre la même marde
Qui goûte la même affaire que toute la marde
De toutes les centres d’achats trois étages du monde entier
Aux Galeries du Boulevard
On a un restaurant
Un
Pis c’est Resto L’Assiette doré
Y en a nulle part ailleurs des Resto L’Assiette dorée
Pis c’est pour ça que ça vaut quelque chose
Pis Mélissa
Pis Lise
Pis Nancy
C’est des serveuses comme le monde aiment
Pas trois chinoises pour le comptoir chinois
Pas trois crisses de face d’halal pour le comptoir d’ostie d’sandwich taouk avec sa mayonnaise que tu rottes 4 jours en lignes
Des serveuses qui ont l’air de t’aimer
Pis de pas se câlisser de toé
C’est ça les Galeries du Boulevard
Dis y ça

JUDITH GILBERT
Fais pas de folie ok, Steven
Jure moi que tu feras pas de folie

CARL
Le monde jase là
J’commence à avoir peur que ça se sache pour les Sicottes

MARIO VAILLANCOURT
Je t’avais demandé d’leu faire peur
Pas plus que ça

CARL
Ben y’avaient pas peur
C’est ça l’problème
Le bonhomme avait sa canne
Y m’câlissait des coups
La bonnefemme avait l’téléphone dins mains
Pis a voulais faire l’911
J’ai ramassé la première affaire j’ai vu
Pis j’ai juste fessé une fois
Fallait j’agisse

MARIO VAILLANCOURT
Ben là tu vas agir encore

CARL
Quoi?

MARIO VAILLANCOURT
Tes filles

CARL
Mes filles?

MARIO VAILLANCOURT
Y ont une valeur

CARL
Non, non, non

MARIO VAILLANCOURT
À c’t’âge là c’est ben payant
Pis c’est pas long
10 minute
C’est quoi 10 minutes?

CARL
Heille/

MARIO VAILLANCOURT
La job ça serait
Chacune 2-3 fois 10 minutes
Ça vaut cher
En un soir ça serait réglé
Je fais nettoyer le truck
Vot’ part est payée
La vie r’devient belle
Moi je leur touche pas là
J’touche jamais
C’est pas mon genre
Ça se ferait dans l’ancien local de Jeans En Vrac
C’est là que ça s’est faite l’aut’ soir
Labrecque a amené deux ptites jeunes du secondaire
Larose pis Pouliot avait droit à 2-3 dix minutes chacun
Pis ça, ça m’a garanti le déneigement de la cour du centre d’achat pour toute l’hiver.
Les jeunes sont venus magasiner avec leur parents queques jours après
C’est comme si y s’était rien passé
Avec internet
Y ont pu peur de rien

CARL
...

MARIO VAILLANCOURT
Y’auraient pas mal tes filles

MÉLISSA
Steven !

MARIO VAILLANCOURT
C’est pas un méchant le gars
Tu laisses les ptites s’endormir
Pis lui
Y flatte

MÉLISSA
Steven !

MARIO VAILLANCOURT
C’est de même qu’y dit qu’y fait ça
Pis y prend des photos
Mais pas la face
Jamais la face

MÉLISSA
Steven est pas nul part
Y répond pas à son téléphone Y’est tu venu icitte?

JUDITH GILBERT
Y doit être parti voir son père

MARIO VAILLANCOURT
Y se réveillent pas
Y braillent pas
C’est quoi leur nom déjà?

CARL
Lorie
Mégane

MARIO VAILLANCOURT
Habille-les pas en putes
Laisse les dans leur linge d’école
Pas d’maquillage
Ah ben Steven.
T’arrives au bon moment
Je pense que votre problème est réglé .
Hein Carl?
C’est réglé hein?

(MUSIQUE)