Marguerite : la traversée

Émilie se questionne sur sa légitimité à «raconter» l’Histoire. Comment parler de l’Histoire si on ne sait pas tout? Dans une véritable quête de vérité, Émilie tente de combler certains «trous» dans l’histoire de Marguerite Duplessis à travers des archives, des bribes d’informations lues dans des documents.

Show Notes

Dans ce troisième épisode, Émilie se questionne sur sa légitimité à «raconter» l’Histoire. Comment parler de l’Histoire si on ne sait pas tout? Dans une véritable quête de vérité, Émilie tente de combler certains «trous» dans l’histoire de Marguerite Duplessis à travers des archives, des bribes d’informations lues dans des documents. Elle se rend à Québec, aux Archives nationales, et consulte pour la première fois les documents d’époque qui portent la signature de Marguerite Duplessis, dont notamment, la transcription de son procès. Toutefois, la seule vérité historique est-elle celle que l’on trouve écrite dans les archives?

Émilie s’entretient avec les historiens Médérik Sioui et Brett Rushforth; le sociologue Philippe Néméh-Nombré et l’historienne Dominique Deslandres.

Conception, texte et narration: Émilie Monnet
Musique: Laura Ortman et Alexis Elina
Narration homme: Mani Soleymanlou
Réalisation sonore: Julien Morissette
Visuel: Simon Guibord
Montage et mixage: François Larivière
Prise de son supplémentaire: Simon Riverin, Greg Hill
Assistance à la scénarisation: Letícia Tórgo
Production: Letícia Tórgo et Stéphanie Laurin
Direction administrative: Gestion Dumont St-Pierre

Marguerite : la traversée est un projet de Productions Onishka et Transistor Média.

Un merci tout spécial à Marilou Craft pour son regard éclairé.

What is Marguerite : la traversée?

Marguerite Duplessis est une héroïne oubliée. Pourtant, elle fut la première esclave autochtone à avoir lutté juridiquement pour obtenir sa liberté. Marguerite: la traversée incarne la quête d’Émilie Monnet pour connaître la vie de Marguerite, sur l’histoire occultée de l’esclavage en Nouvelle-France et sur les résonances que l’on retrouve encore aujourd’hui.

POÈME
Il y a la force du courant qui fait remonter les mémoires à la surface
Il y a l’écume comme une trace éphémère du passé
Il y a l’eau qui lie les combats de tous les peuples opprimés

ÉMILIE MONNET
Depuis ma rencontre avec son histoire, Marguerite m’habite. Mais comment est-ce qu’on fait pour raconter l’histoire d’une femme dont il reste peu de traces et dont la voix sur le papier a été filtrée par les autres? Existe-t-il d’autres façons que l’écrit pour accéder à la mémoire? L’oralité est au cœur des cultures autochtones. Il existe des protocoles et une rigueur pour retransmettre de manière élaborée les savoirs de nos ancêtres. Comme l’explique l’historien Wendat Médérik Sioui, c’est toute la mémoire d’un peuple qui en dépend.

MÉDÉRIK SIOUI
Les Jésuites quand ils sont arrivés, ils ont resté vraiment surpris. La plupart des, des nations des communautés étaient capables, de, les gardiens du savoir était capables de parler de l'histoire de leur communauté de leur nation sur 3, 4, 500 ans pratiquement. Et avec une précision et une, une, comment, constance inégalée. Donc, c'est de quoi qui était vraiment important.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Est-ce que l’histoire orale pour toi, elle a autant d’importance que les archives?

MÉDÉRIK SIOUI
Oui, tout à fait. Mais je pense qu’on gagne à intégrer le plus de perspectives possibles. Le discours des, des aînés m'a également permis de comprendre les limites importantes des archives puisque, comme je le dis souvent, les archives généralement sont destinées à des supérieurs. C'est souvent des rapports autres donc on... généralement, on essaie de dépeindre une réalité embellie, je dirais, de nos actions et de nos travaux en tant que fonctionnaire ou en tant que personne chargée d'un dossier ou d’un rapport, donc on… ils n’étaient pas au courant de tout, de toute façon.

ÉMILIE MONNET
Les récits oraux peuvent préciser et apporter des nuances aux traces écrites de l’Histoire. En 1997, la Cour Suprême du Canada les reconnaît comme preuve à part entière au même titre que l’écrit.

MÉDÉRIK SIOUI
Je pense pas que l'objectivité existe vraiment dans l’histoire, ni dans les archives. Si on, on s'imagine que l'objectivité pure existe, à ce moment-là je pense qu'on a une quête de la vérité, pis cette vérité-là devient une vérité qui écrase l'autre ou les autres vérités.

ÉMILIE MONNET
L’historien Brett Rushforth abonde dans le même sens que Mederik Sioui: il n’existe pas une seule vérité mais plusieurs pistes de vérités, élaborées à partir des fragments d’information qu’il nous reste.

BRETT RUSHFORTH
If you're interested in anyone but a handful of very powerful, literate people, all that's left are these little tidbits. You know, you might compare it to shards of pottery. You might compare it to, you know, a little clues that exist in a mystery, but what we have are the pieces that sort of incidentally make their way into the archive. And if we are interested at all in the vast majority of humanity, people who were not in power, people who were Indigenous in a colonial world, or people who were enslaved in a settler free world, people who spoke, you know, different languages than French in Montreal in the 18th century or even just women.They had all the range of hopes and expectations and disappointments and friendships and loves and enemies that we all have. But we don't have thousands of letters and page after page of diaries or, you know, very much at all left of their lives. And so, to, to get at their experience, the only option is to do some imagination. And I think critical fabulation is one way to frame it.

ÉMILIE MONNET
La fabulation critique est un terme avancé par la sociologue américaine Saidiya Hartman. On l’utilise pour combler les silences des archives, surtout pour l’esclavage transatlantique. C’est une écriture qui combine la recherche historique, la théorie critique et la fiction narrative, et qui a inspiré de nombreux chercheurs. En tant qu’artiste, la fabulation critique, ça me permet d’imaginer Marguerite et de remplir les trous dans son histoire. Son procès aux Archives, c’est tout ce qu’il nous reste d’elle. Philippe Néméh-Nombré est sociologue à Montréal. Ses recherches portent sur les relations, les tensions et les solidarités entre peuples autochtones et communautés noires en Amérique, au Canada et au Québec.

PHILIPPE NÉMÉH-NOMBRÉ
Je pense que méthodologiquement on n'a pas le choix de faire de la fabulation critique justement, donc, d’essayer de, de de, pas de… j’allais dire extraire mais pas d'extraire, de de reprendre ces documents là et euh d'essayer d'en dégager ce qui aurait pu être. Ce qui aurait pu être de tout ce que l'archive ne nous dit pas, mais vers les choses vers lesquelles l'archive nous pointe c'est-à-dire quand on a accès à la vie des esclaves, on y a seulement accès à travers l’archive de la violence. À travers, comme tu le disais, les actes notariés, les archives de journaux et ainsi de suite. Et la la la seule chose qu’on peut avoir directement en regardant ça, c’est la texture de la violence. Euh à l'intérieur de de d'une même maison, dans la propriété des, des colons, ben, y'a des y'a des proximité qui sont pas spéculées. Il y a effectivement des esclaves noirs et autochtones qui vivent différemment, une même violence. Donc, là on a quelque chose de très tangible. C’est des violences très différentes, mais qui se rejoignent à plusieurs points.

ÉMILIE MONNET
Le constat est évident: même si la forme concrète de l’esclavage a pris fin, ses répercussions se font ressentir encore aujourd’hui. Tous les indicateurs de violence le démontrent. En milieu carcéral par exemple, les communautés autochtones et noires sont surreprésentées.

PHILIPPE NÉMÉH-NOMBRÉ
Souvent, on pense l'archive comme quelque chose qui est très lointain mais, si aujourd'hui t'essayais d'aller trouver les statistiques contemporaines sur la population carcérale, noire et autochtone dans les établissements carcéraux québécois, tu n'y aurais pas accès. Si la seule archive qu’on a, c’est l’archive de la violence, bin… comment on fait pour faire émerger des résistances, pour les voir même. Comment est-ce qu’on peut habituer notre regard, notre oreille, nos sens à les sentir même aujourd’hui dans le présent?

(MUSIQUE)

ÉMILIE MONNET
Je fais la route Montréal-Québec avec l’historienne Dominique Deslandres pour consulter le procès de Marguerite. Je veux sentir l’odeur du vieux parchemin, voir de mes yeux la signature de Marguerite, passer mes doigts sur sa calligraphie. Voir si par ce contact tangible, je peux faire apparaître Marguerite.

ÉMILIE MONNET [terrain]
OK.

DOMINIQUE DESLANDRES
On y est.

ÉMILIE MONNET [terrain]
On y est. On est où?

DOMINIQUE DESLANDRES
On est aux archives nationales à Québec.

ÉMILIE MONNET [terrain]
À Sainte-Foy à l'Université Laval

DOMINIQUE DESLANDRES
Et on est en train de, ouvrir des boîtes

ÉMILIE MONNET [terrain]
Y'a deux boîtes. Ah non, y'en a trois.

DOMINIQUE DESLANDRES
dans lesquelles sont les procès de…

ÉMILIE MONNET [terrain]
Ça y'a quoi là-dedans?

DOMINIQUE DESLANDRES
Ben je sais pas. (rires) Attends, on va commencer par l'ouvrir comme il faut.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Ouais. On met pas des gants blancs, ici?

DOMINIQUE DESLANDRES
Ben, ça a pas l'air.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Ah, mon Dieu, regarde ce papier là!

DOMINIQUE DESLANDRES
Oui.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Ayoye.

DOMINIQUE DESLANDRES
Ok

ÉMILIE MONNET [terrain]
Ça la ça date de 1740, ce livre là.

DOMINIQUE DESLANDRES
Peut-être… Appel. Là c'est son appel.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Ouais, c'est là, c'est la qu’elle signe: Marguerite. Ahhhhhh!

DOMINIQUE DESLANDRES
okay, voilà, c'est ça.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Voici sa signature. Marguerite Duplessis. Waouh. Elle signe avec deux T. Mais elle savait écrire. On voit là quand même. Elle savait signer.

DOMINIQUE DESLANDRES
Mais tu sais? Savoir signer c'est pas nécessairement savoir lire ou écrire, tu peux savoir dessiner les lettres parce qu'on te l'a montré. Mais c'est quand même quelque chose. Elle sait combien ça peut être important de, de, ben, d'apposer sa signature.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Mais c'est vrai que de voir son écriture, ça… On a l'impression de de de toucher un peu à qui elle était. C'est comme la seule trace qui nous reste d’elle aussi hein, sa signature.

DOMINIQUE DESLANDRES
Puis on peut voir le geste aussi. Ce geste-là te ramène dans le passé aussi.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Hum hum. Hum. Wow… Marguerite Duplessis. Ouais, sont… Ça me fait quelque chose de passer mes doigts la dessus.

(MUSIQUE)

ÉMILIE MONNET
Le procès de Marguerite dure tout le mois d’octobre 1740. Il faut trois boîtes aux Archives pour contenir tous les documents.

DOMINIQUE DESLANDRES
Puis ce qui est formidable ici au Québec, c'est que nous nos archives sont extrêmement sur une longue durée, donc d'une profondeur, depuis le 17e siècle jusqu'à, jusquà la conquête, ça a pas brûlé, on n'a pas eu de révolution qui est venu comme la Révolution française, tout détruire, les papiers importants et cetera. Donc on se retrouve avec une continuité dans les archives qui est intéressante aussi. Et dans les archives paroissiales, qu'on recoupe avec les archives judiciaires, qu'on recoupe avec les archives notariales. Comme ça, on peut voir les transactions et tout ça. Et on peut recréer tout un monde qui est absolument fascinant et beaucoup plus coloré qu'on le vit.

ÉMILIE MONNET
Au début de son procès, Marguerite se trouve à la prison de Québec. Ce n’est pas tout à fait clair pourquoi elle y est emprisonnée, mais elle est accusée d’être une gueuse, une voleuse et une libertine par son nouveau maître Marc Antoine Huart Dormicourt. Dormicourt est officier des troupes de la marine et il compte déporter Marguerite en Martinique. Marguerite s’y oppose et entreprend alors des démarches pour faire reconnaître sa liberté. C’est une femme libre et la fille de Feu Sieur Duplessis Faber.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Fait que ça c'est la requête de Marguerite, c'est la première dans ces...

DOMINIQUE DESLANDRES
Elle n'est pas née d’une esclave et que par conséquent, elle est née libre.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Cependant on lui conteste son état dans les temps même (hésitation) qu'étant sur les terres

DOMINIQUE DESLANDRES
C'est ça.

ÉMILIE MONNET [terrain]
de l'obéissance de sa majesté qui sont un pays de liberté pour tous ceux qui comme la suppliante font profession de la religion catholique apostolique et romaine…

MANI SOLEYMANLOU [lecture]
… de la religion catholique apostolique et romaine. Son esclavage cesserait par la raison qu’elle serait par là, devenu sujette du roi. Mais non seulement on prétend que la suppliante est esclave, le Sieur Dormicourt juge lui-même la contestation en resserrant la suppliante dans une étroite prison. Et comme la liberté étant un droit naturel, elle doit être accordé provisionelement a ce dont l’esclavage n’est pas prouvé. La suppliante a recours à l’autorité de votre grandeur pour obtenir sa liberte provisoire. Et elle continue à ces vœux pour la conservation de votre grandeur.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Jacques Nouette de la Poufellerie pour Marguerite Duplessis.

(MUSIQUE)

ÉMILIE MONNET
Jacques Nouette est le procureur de Marguerite : c’est par lui que Marguerite adresse sa requête à Dormicourt pour contester son esclavage.

DOMINIQUE DESLANDRES
Là, on sait qu'elle habite rue Desjardins chez chez Nouette en attendant en liberté provisoire, n'est-ce pas? Donc, ah, tiens bon ben, il devait au moins avoir une chambre pour elle ou quelque chose, il va pas la mettre par terre…

ÉMILIE MONNET [terrain]
Ou ils étaient amants.

DOMINIQUE DESLANDRES
Ou ils étaient amants…

ÉMILIE MONNET [terrain]
Pourquoi tu penses qu'il l'a défendu, elle?

DOMINIQUE DESLANDRES
Par amitié, peut-être, par intérêt. Ce qui s'est dit, c'est une manière de faire du fric parce qu'il réclame à un moment donné, presque 2000 livres dans le, le cours du procès. Est ce que c'était ça? Je sais pas, on n'est pas, on peut, tout ce qu'on peut savoir c'est qu'il a utilisé sa prose d'une manière très véhémente avec des mots très forts. Donc, on pourrait croire qu' il a fait ça pour la défendre parce qu’il y croyait vraiment.

ÉMILIE MONNET
Suite à la requête de Marguerite, Dormicourt s’enflamme. Il s’oppose avec véhémence aux arguments avancés par Marguerite : c’est une Panisse, elle est donc son esclave et il doit l’embarquer sur le champ vers la Martinique, où il dit posséder une plantation.

MANI SOLEYMANLOU [lecture]
Ledit Sieur Nouette, demande par sa nouvelle requérante une prolongation d'une année, afin de faire intervenir en cause des nouveaux témoins. Ceci est un faux fuyant frivole. Cela ne sert qu'à prolonger les délais sans cause afin d'ôter lieu au suppliant de faire embarquer ladite esclave pour l'Amérique sur les vaisseaux qui sont prêts à faire voile. Vu que le cas requiert célérité, rendre votre jugement en ce jour pour déclarer ladite Marguerite panisse esclave, et en conséquence permettre audit suppliant de la faire embarquer sur le champ sur un vaisseau prêt à partir cette semaine.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Pis, c'était qui, alors, les Panis?

DOMINIQUE DESLANDRES
Alors, les Panis, ben, c'est c'est un nom qui est devenu un peu générique pour désigner des tribus autour de ce qui est et le Nebraska actuel.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Les Pawnees?

DOMINIQUE DESLANDRES
Pawnees, qui, eux, donc le nom, un peu déformé et devenu, c'est devenu synonyme d'esclave autochtone. Donc on dit Panis ou Panises avec 2 s-e pour une femme. C'était des ennemis des alliés autochtones, des Français.

ÉMILIE MONNET [terrain]
C’est devenu un terme générique?

DOMINIQUE DESLANDRES
C'est ça.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Ouais.

ÉMILIE MONNET
S’ensuit alors un va et vient entre les 2 parties. Le procès prend de l’ampleur et passe au Conseil Supérieur de Québec, la plus haute instance judiciaire de l’époque. L’urgence de trouver un dénouement à la situation est palpable sur le papier parchemin. Dormicourt argumente que le cas requiert célérité : nous sommes déjà à la fin octobre, le fleuve risque de bientôt geler, et les navires ne pourront plus quitter le port.

Marguerite convoque 2 témoins qui ne se présenteront jamais en Cour. Nouette fait la requête d'attendre l'année suivante pour que le frère de Duplessis Faber vienne confirmer l’identité de Marguerite. Dormicourt, lui, refuse de fournir son acte de vente. Puis coup de théâtre : Dormicourt fait intervenir 2 témoins. René Bourassa et Nicolas Sarrazin, qui ont connu Marguerite enfant au poste de traite de Green Bay. Ils la reconnaissent à son œil balafré.

Le 30 octobre 1740, l’intendant Gilles Hocquart rend sa sentence. C’est lui qui supervise le procès de Marguerite et il est lui-même propriétaire d’esclaves. Marguerite est reconnue propriété de Dormicourt. Il peut l’embarquer sur le champ vers la Martinique. C’est la dernière trace qu’il nous reste de Marguerite.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Est-ce que ça pourrait être possible qu'elle dise la vérité, Marguerite?

DOMINIQUE DESLANDRES
Mais ça se peut.

ÉMILIE MONNET [terrain]
Que… qu'elle ait été la fille de feu de Sieur Duplessis.

DOMINIQUE DESLANDRES
Oui. Ça se peut. Comme ça se peut aussi que ça soit une idée qu'elle a de de... après avoir parlé avec Nouette, de, de, de, de sortir de l'esclavage. Il y a des, des, des, des choses qui sont quand même, comment dirais-je, qui vont en sa faveur, entre autres, on n'a pas découvert l'acte de vente de d'une... des 2 des 2 marchands là, qui, dans les pays d'en haut, aurait vendu la jeune...

ÉMILIE MONNET [terrain]
Oui.

DOMINIQUE DESLANDRES
La jeune Marguerite à Duplessis Faber, ça y a pas de trace. On lui fait un procès, on l'amène en justice, il faut qu’elle amène ses preuves et tout ça, donc on lui donne un traitement. Ça c'est intéressant de de savoir ça. Ils auraient très bien pu dire : « T'es une esclave, tu vas pas en justice parce que l'esclave a zéro droit. » Mais là voilà qui est quand même saisie en fait en justice. Et la voilà qui se défend et y a des gens qui sont pour elles. Il y a des gens qui croient à son histoire, donc. Qui sait?

ÉMILIE MONNET
Aller aux Archives pour voir le procès de Marguerite m’apporte certaines clés de réponses mais j’en ressors surtout avec encore plus de questions. A-t-elle cru qu’elle pouvait gagner son procès? Qu’a-t-elle ressenti au moment de sa sentence? Et qu’est-ce qui s’est passé après? Les traces papier s’arrêtent ici mais y a-t-il moyen de faire émerger les mémoires autrement que par les archives? Je décide de partir sur les traces de Marguerite et de faire moi aussi le trajet jusqu’en Martinique.

POÈME
Il y a le froid qui fait geler le fleuve et emprisonne les coques des navires
Il y a le gouffre qui s’ouvre quand on perd pied sur son destin
Il y a les mémoires occultées qui finissent toujours par remonter à la surface

ÉMILIE MONNET [GÉNÉRIQUE COURT]
Marguerite : la traversée est un projet de Productions Onishka et Transistor Média
Conception, texte et narration : Émilie Monnet
Musique : Laura Ortman
Narration homme : Mani Soleymanlou
Conception sonore : Alexis Elina
Réalisation sonore : Julien Morissette
Visuel : Simon Guibord
Montage et mixage : François Larivière
Prise de son supplémentaire : Simon Riverin, Greg Hill
Assistance à la scénarisation : Letícia Tórgo
Production : Letícia Tórgo et Stéphanie Laurin
Direction administrative : Gestion du Mont Saint-Pierre
Un merci tout spécial à Marilou Craft pour son regard éclairé.
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